Au milieu du XIXe siècle, la Nouvelle-Calédonie encourage tous les secteurs de production de la colonie naissante. Ainsi, plusieurs usines sucrières furent construites à Dumbéa (Koé et Nimba), Saint Louis, La Tamoa, Boulouparis (Ouaménie), Païta et Bourail (Bacouya). Le projet de l’usine de Ouaménie, à Boulouparis, est porté par Louis Nas de Touris, un Bourbonnais missionné par le comte Kerveguen, un riche habitant de La Réunion, décidé à investir sa fortune en Nouvelle Calédonie. Car à la même époque, l’île de l’océan indien connaît une grave crise de la canne à sucre, véritable pilier de son économie. Les regards convergent alors vers le Pacifique qui cristallise tous les espoirs. Nas de Touris y obtient une concession de plus de 3 000 hectares et crée ainsi la première implantation agricole de la région de Boulouparis. Avec l’aide d’une d’une quinzaine d’ouvriers et de nombreux indiens, l’usine connaît un essor de courte durée. « Il faut tordre le cou à une information erronée affirmant que l'usine a été ruinée à cause de l'insurrection de 1878, souligne l’historien Benoît Delvinquier. En fait, dès la fin de 1875, son propriétaire cherchait à la céder à l'administration locale et l’alambic fut vendu dès 1876. » La sècheresse et une invasion de sauterelles eurent raison des cultures et précipitèrent la ruine de l’entreprise, avant qu’elle ne soit pillée et incendiée lors de l’insurrection. « Au cours des journées des 25 et 26 juin 1878, lors de l'attaque de Boulouparis, un détachement militaire a occupé l'usine comme base arrière, pour accueillir les colons en fuite », précise l’historien. Un patrimoine fragile Cent trente ans plus tard, il ne reste de l’usine que des pans de murs en pierre, une cheminée quadrangulaire à sept degrés, haute de 25 mètres, intacte, et une chaudière rouillée. Aujourd’hui, c’est un domaine privé dédié à l’élevage de cerfs, dont l’activité est pour le moment en suspens. Roger Siret, président de l’association Patrimoine de Boulouparis prévoit d’y organiser une visite lors du prochain Mois du patrimoine. « Il y a deux ans, le site avait attiré entre 80 et 100 personnes (…). A long terme, on voudrait réhabiliter l’usine pour y créer un lieu de rencontres et proposer des animations. » En attendant sa valorisation, l’usine a été classée. Une démarche qui permet « d’empêcher sa démolition et de reconnaître sa valeur patrimoniale qui reste à sauvegarder », rappelle Miguel Harbulot, chef du service du patrimoine de la province Sud.