La maison Draghiceviz, la discrète

Entourée par les immeubles modernes de la rue Gallieni, la maison Draghiceviz résiste. Il suffit de lever le nez du trottoir et de la circulation, pour que la demeure âgée de plus de 120 ans dévoile ses charmes.

L'immeuble a été édifié entre 1885 et 1888. À cette époque, la rue du Général-Gallieni s'appelle encore la rue Solferino. Le bâtiment porte le nom de son premier propriétaire, Gérolimo Draghiceviz. Originaire de Dalmatie - la Croatie actuelle - l'homme est considéré comme un touche-à-tout. Industriel, artisan, mineur et entrepreneur, il profite de la demande croissante de briques pour créer une usine en 1864 ou 1865, au Mont-Dore. Vers 1875, il engage la construction du Tribunal de la Marine (Vallée du Génie), et dix ans plus tard, de l'immeuble de la rue Solferino. Un emplacement stratégique qui intéresse bien vite Victor Bouillier, le directeur de la toute nouvelle succursale de la Banque d'Indochine en Nouvelle-Calédonie qui y restera de1888 à 1895.
Après le décès de Gérolimo Draghiceviz en 1902, la demeure revient à sa veuve qui la cède à la société Le Chrome en 1906. Elle abritera ensuite le siège de la société du Tour de côte en 1933, avant d'être acquise par la société civile de Saint-Louis, en 1937. Vendue en 1991, elle devient la propriété de la SCI Djovan jusqu'en 2009.

Bâtiment protégé et activité commerciale
Aujourd'hui, le propriétaire de la maison, un particulier, continue d'y louer deux locaux commerciaux. Une situation parfois délicate à gérer pour un bâtiment qui a été en grande partie inscrit à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques en 2001, à l'initiative, notamment, de l'association Racines. À l'issue d'une étude de l'immeuble, menée par le service du patrimoine historique et culturel de la province Sud, il a été décidé d'inscrire les façades Est et Sud, la cave voûtée, l'escalier en pierre taillée - une rareté à Nouméa -, le garde-corps en fer forgé du balcon et le portail latéral.
Malgré toutes ces attentions, la maison Draghiceviz a tout de même souffert de la présence de commerces. Ainsi, deux des trois ouvertures du rez-de-chaussée, à l'origine identiques et surmontées d'une arche, ont été agrandies afin de créer des vitrines, au détriment de l'harmonie du bâtiment.
Parmi les joyaux de la maison, le trottoir et ses bordures, composé, sur toute la longueur du bâtiment, de carreaux en terre cuite, ainsi que la cave voûtée qui aurait abrité les expérimentations d'un certain Muller Von Eblem, savant géophysicien de son état. Le 22 août 1893, celui-ci aurait effectué des mesures de pesanteur, apportant ainsi sa contribution à la naissance de la technique de la gravimétrie...