Au début des années 30, Edouard Foussard, un médecin ingénieux à la fibre artistique, entreprend de fabriquer un manège vélocipédique.
Au début des années 30, Edouard Foussard, un médecin ingénieux à la fibre artistique, entreprend de fabriquer un manège vélocipédique. Une œuvre qui tournera durant près de trente ans dans les fêtes foraines nouméennes.
« Lorsque la crise a touché la Nouvelle-Calédonie en 1928, 1929 et 1930, Monsieur Édouard Foussard, notre père, mon frère Raymond et moi-même possédions un atelier de travaux mécaniques en tout genre. La vie était dure, au point que notre père, qui avait de solides connaissances, accompagnées d’un esprit ingénieux et inventif, avait mis au point en cachette, dans sa cave, une maquette avec plans détaillés d’un manège de vélos, dont la grande originalité était d’avoir pour seule source d’énergie les mollets des pédaleurs », écrit Henri Foussard. Apparemment motivée par un souci économique, l’entreprise du père Foussard n’en était pas moins imaginative et récréative. Il fallut deux années de travail au père et à ses deux fils pour construire ce manège insolite, qui amusera petits et grands, jusqu’en 1960, lors des fêtes foraines du 14 Juillet et du 24 Septembre sur la place des Cocotiers et la place Bir Hakeim. Partiellement détruit par un cyclone, le manège est légué en l’an 2000 à la province Sud et classé monument historique l’année suivante. Dans le cadre des classes patrimoine, deux collèges et un lycée sont impliqués dans le projet de sa restauration. La restauration complète de la superstructure en bois est confiée au lycée Pétro Attiti, celle des vélocipèdes à la Segpa du collège des Portes-de-Fer et la peinture des parties métalliques à la Segpa du collège de Magenta. Quant à la décoration, d’inspiration Art déco et Art nouveau, elle revient à l’artiste Frédéric Fichet, président de l’association Art et action au Centre d’art. « J’ai commencé par un premier travail d’inventaire, explique-t-il. J’ai déblayé de vieux objets entassés au château Hagen pour retrouver les cadres de vélos, les montants… Il s’agissait de photographier les pièces restantes et d’étudier les décors d’après des documents d’époque. » Au fil de ses recherches documentaires,il trouvera même un autre manège vélocipédique, construit sur le même principe que celui du père Foussard, exposé au musée des Arts forains de Paris.
Comme un jeu de piste Son étude minutieuse est ralentie par une iconographie incomplète et, qui plus est, en noir et blanc. « Il a fallu travailler sur les valeurs des couleurs grâce à un logiciel de retouches d’images. Avec des filtres, j’ai essayé de retrouver les formes à partir des photos d’époque. Puis j’ai redessiné les motifs, j’ai dû imaginer ce que c’était. » Une mise en couleur digne d’un jeu de piste, dont résultera une première maquette. « Il est certain qu’il y a une part d’interprétation, ce n’est pas la copie conforme de l’original. […] J’ai pris des décisions plastiques pour essayer de retrouver au mieux l’ambiance. » Une atmosphère fraîche, fleurie, gaie et colorée. Pour l’heure, Frédéric Fichet s’attelle à une nouvelle étape : la réalisation. À commencer par les douze panneaux qui forment la décoration intérieure du manège, illustrés depaysages de falaises et de moulins, qui « n’ont rien d’un paysage calédonien. […] On y voit aussi un pot, une coupe antique fleurie.» Des indices néanmoins insuffisants pour nous renseigner sur l’origine du lieu. À ces panneaux, succéderont bientôt vingt-quatre bandeaux supérieurs, qui forment la couronne du manège. « C’est très long et fastidieux, car tout est fait à la main. On n’a pas voulu utiliser les procédés modernes de reproduction, ce n’est pas le but. C’est un vieux manège qu’on essaie de restituer comme il a été fait, il y a presque un siècle. »