Sexualité maternité parentalité au féminin

Suite témoignage P. 76 beaucoup d’herbe et je buvais beaucoup, j’étais déprimée. Pour gagner de quoi boire, on vendait de l’herbe, on mendiait. Les gens sont généreux. J’ai fait une tentative de suicide avec des médicaments. Ma sœur est descendue de brousse pour me parler, me dire qu’il fallait que je me réveille, que je réagisse pour ma fille, que j’arrête l’alcool. Ma fille allait à l’école maternelle de Rivière salée. Je ne faisais rien, j’étais fatiguée. J’ai cherché du travail mais j’avais un CV trop faible. Ma grande sœur m’a conseillée d’aller à l’École de la réussite, car on lui avait dit que les gens étaient compréhensifs, qu’ils s’intéressaient aux jeunes. Je fais actuellement une formation d’agent logistique. Dans les moments de découragement, je pense à ce que j’ai vécu avec ma fille, à ma situation et je me dis que je ne dois pas lui faire subir ce que j’ai vécu. Je me bats pour lui donner le meilleur. Mais j’ai du mal avec elle, du mal à lui faire des câlins. J’essaye de la prendre dans mes bras, mais rapidement je m’énerve et je la laisse. J’essaye de prendre sur moi, un jour je vais y arriver. Je vois autour de moi des femmes soumises. Ça me révolte de voir se reproduire ces situations douloureusement vécues. Je ne comprends pas pourquoi elles restent. Mon frère a eu une enfance difficile, il tape ma belle-sœur. C’est l’amour vache. Je dis à ma belle-sœur de partir quand il est loin, mais il crie, il la rattrape et il la tape encore. Je lui dis de ne pas rester avec un homme violent, même si c’est mon frère, mais elle reste. Les femmes ont du mal à avoir le déclic. Elles ont tellement subi qu’elles trouvent cela normal, mais je n’ai pas envie de cette reproduction. Beaucoup de jeunes filles sont dans mon cas, mais la violence est un sujet tabou. Je leur donne des conseils, mais quand je commence à parler, il y a toujours quelqu’un qui m’interrompt et change de sujet, alors je n’insiste pas… et ça continue. Au début, je ne savais pas qu’il existait des droits pour les femmes et les enfants. Maintenant on est mieux informées, il y a la prévention. À l’École de la réussite, on nous parle des risques de la vie, mais avant il n’y avait rien. Le Grand Nord, c’est loin de tout. Mon enfant m’a permis d’avoir le déclic de la responsabilité, elle m’a réveillée. Jamais je n’ai voulu l’abandonner, mais je n’ai pas eu le temps de m’occuper de mon couple. Il fallait faire un choix et j’ai fait celui de l’enfant. Je voudrais que mon témoignage aide les filles, leur dire qu’elles ne se fient pas aux apparences, aux belles promesses, qu’elles ne fassent pas les mêmes erreurs que moi. S., 24 ans, originaire de la province Nord, mère d’une petite fille de 5 ans

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