Le travail au féminin

Quelle place réservez-vous aux activités coutumières ? La coutume passe toujours en premier. Dans la mesure du possible, j’essaye de m’organiser à l’avance pour trouver le temps de tout faire. J’ai le devoir d’assister aux cérémonies coutumières aux côtés de mon mari et d’accomplir mon rôle d’épouse lors des rassemblements coutumiers. Témoin de l’Histoire, je suis responsable de sa transmission à mes enfants. C’est mon rôle de mère. Je passe sans cesse d’un monde traditionnel à un monde moderne avec une grande fluidité. L’usine métallurgique de Vale, voisine de la tribu de Goro, a-t-elle changé le quotidien des femmes de Yaté ? Avec l’usine est arrivé l’argent, beaucoup d’argent. Les mentalités ont évolué. Les femmes ont eu des salaires, elles se sont ouvertes au monde extérieur. Elles sont plus réceptives aux règlementations environnementales, à celles de la sécurité. Elles sont plus autonomes, se déplacent en voiture ou en taxi alors qu’avant, elles allaient à pied. Leur quotidien s’est nettement amélioré et avec les surplus, elles gâtent les enfants, leur achètent des tablettes, des smartphones, etc. Avant on n’avait rien, on allait à la pêche ou aux champs. Très rares sont les femmes qui ont eu le courage de quitter Yaté pour s’installer à Nouméa et y travailler. Maintenant, quand une jeune fille a besoin d’argent, elle va se faire embaucher à l’usine, ou ailleurs, et ensuite elle revient à la tribu. Nous avons été pris dans l’engrenage de la modernité, il faut désormais se battre pour préserver la vie en tribu. Tout est allé très vite et il n’y a eu pratiquement aucune résistance. On le voit bien avec la modification des habitudes alimentaires. Les enfants préfèrent le poulet et les saucisses au poisson avec, à l’âge adulte, les conséquences médicales que l’on connaît : obésité, diabète. Les mères sont dépassées, elles cèdent aux exigences de leurs enfants. Pourtant c’est à elles de réagir, ce sont elles qui sont à la manœuvre, pas les hommes. Les femmes doivent montrer l’exemple dans la vie de tous les jours et aussi dans les cérémonies coutumières en bannissant certains produits, qui n’ont rien de traditionnels, et sont en plus nocifs pour la santé. « L’homme a autorité sur la terre et la femme sur les enfants, leur éducation et la vie familiale. La femme est l’être sacré qui donne la vie et doit être respectée comme telle. […] La société kanak est une société patriarcale […] les femmes sont appelées à servir dans d’autres clans […]. » Charte du peuple kanak, socle commun des valeurs et principes fondamentaux de la civilisation kanak, proclamée le 26 avril 2014. Que dit la Charte du peuple kanak sur le rôle de la femme ? « Dans la culture kanak, la femme est l’eau, le feu et la vie au sein de la famille et du clan. Il est donc plus qu’indispensable qu’elle soit présente à la maison. » P. 47 Mission à la condition féminine de la province Sud

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