SudMag Juin 2023

Sudmag.nc | Juin 2023 11 On pourrait croire nouveau cet intérêt pour la Nouvelle-Calédonie, en tant que spot stratégique de l’axe indopacifique. Pourtant, depuis Marco Polo jusqu’au nouveaux enjeux de ressources et d’espaces, le Pacifique a toujours été le théâtre d’une lutte d’influence. Parfaitement incarnée, pour notre petit archipel, par la présence de 130 000 soldats américains sur le territoire calédonien pendant la Seconde Guerre Mondiale. Une base arrière pour rassurer et mobiliser En 1942, en pleine guerre du Pacifique, qui oppose un Japon expansionniste aux Etats-Unis, Royaume-Uni, Pays-Bas, Australie et Nouvelle-Zélande, l’empire japonais avance ses pions jusqu’à Guam et les îles Salomon. « Il ne restait plus que les Nouvelles-Hébrides et la Nouvelle-Calédonie à proximité, explique Fanny Pascual. Sous le commandement américain, les forces alliées ont investi le territoire pour en faire une base arrière et une tête de pont. Outre sa position privilégiée, il faut dire que la Calédonie ne présentait pas de risque sanitaire pour les soldats car le territoire n’était pas touché par la Malaria, et qu’elle était ultra-protégée par son lagon fermé, où seules les passes sont à surveiller. Une initiative tactique, donc, qui permettait de rassurer l’Australie et la Nouvelle-Zélande, tout en offrant une position stratégique, des ressources et des connexions à d’autres territoires français comme la Polynésie française ou Wallis et Futuna. » Pour la population locale, cette présence étrangère apporte alors « une véritable ouverture au monde, à la modernisation, à la culture, à un rapport à l’autre différent. Un vrai bond dans le temps. » La guerre avance cependant très vite dans le Pacifique et le bras de fer se joue en 6 mois. Les alliés progressent vers le Nord, laissant petit à petit la base calédonienne La Nouvelle-Calédonie, une place stratégique qui ne date pas d’hier Il y a 80 ans déjà, lesAméricains s’installaient en Nouvelle-Calédonie, pour 4 ans. Leur séjour, à visée militaire en pleine Seconde Guerre Mondiale, a considérablement changé la face du Caillou. Mais il a aussi affirmé aux yeux de tous la position stratégique de la Nouvelle-Calédonie, au cœur d’enjeux géopolitiques forts. Fanny Pascual, maître de conférence en histoire contemporaine à l’Université de Nouvelle-Calédonie, spécialiste de la Seconde Guerre Mondiale dans le Pacifique, revient avec nous sur cet épisode, qui a (re)placé la Nouvelle-Calédonie sur l’échiquier mondial. se réduire, avant un départ définitif des troupes en 1946. Le Pacifique reste une zone d’influences Mais à cette heure, la région passe déjà d’une guerre à l’autre. « Si la Calédonie n’a pas connu les affres de la Guerre Froide, les conflits se sont cependant poursuivis sur nos frontières : Indonésie, Corée, Vietnam… Puis le Pacifique est devenu le terrain de jeu du nucléaire, une terre d’essais comme à Moruroa ou Bikini ». Malgré la fin de la Guerre Froide, les jeux d’influence continuent : l’URSS en son temps, puis plus récemment la Chine, se sont rapprochés des pays du Pacifique. Dans ce monde où chacun cherche des alliances et des ressources, la Nouvelle-Calédonie représente indéniablement un atout commercial et militaire de taille pour la France et ses partenaires.

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