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GRATUIT L'ACTUALITÉ DE LA PROVINCE SUD www.sudmag.nc | #016 | Septembre 2024 Construire l’avenir autrement

3 ÉDITO RESPONSABLE DE LA PUBLICATION : Sonia Backès | RÉDACTEUR EN CHEF : Nicolas Pannier | RÉDACTION : Di rect ion de la communicat ion de la prov ince Sud. P H O T O S : N i c o l a s B o n n e a u , N i c o l a s P e t i t e t D D e c l i c k p h o t o g r a p h i e - A u d r e y D a n g ( p h o t o d e U n e ) . M O N T A G E : D i r e c t i o n d u S y s t è m e d ' I n f o r m a t i o n e t d u N u m é r i q u e ( D S I N ) | I N F O G R A P H I E : A g e n c e C r é a t i v e . IMPRESS ION : 35 000 e x emp l a i r e s - E I P Ed i t i on s & Imp r e s s i on s du Pa c i f i que, s u r du pap i e r gé r é du r ab l emen t FSC | I SSN 2497-6903 . MAGAZINE INTERACTIF RETROUVEZ-NOUS EN LIGNE Vous trouverez des QR Codes dans les pages du Sud'Mag. Ils vous permettent d’accéder à du contenu supplémentaire et détaillé en lien avec les articles du magazine. Utilisez votre smartphone et flashez-les. Toute l’actualité de la province Sud à tout moment, disponible sur votre ordinateur, tablette et smartphone : sudmag.nc Dites-nous ce que vous en pensez ! Donnez-nous votre avis sur le SudMag que vous avez entre les mains afin que les prochains numéros répondent toujours à vos attentes. Formulaire en ligne : province-sud.nc/form/suggestion-sudmag La nécessité de songer à la vie d’après J ’entends certains tenter de se convaincre qu’un retour à la vie normale est imminent. Que nous retrouverons tous notre vie d’avant, celle de la paix et du vivre-ensemble. C’est une demi-vérité. Si nous ne pouvons qu’aspirer à revivre à nouveau dans la quiétude et le respect des uns des autres, si nous ne pouvons qu’espérer que les mots « couvre-feu », « navette maritime » et « destruction » ne deviennent plus qu’un mauvais souvenir, la vague de violence qui s’est abattue restera gravée dans l’histoire de la Nouvelle-Calédonie. Telle une cicatrice qui peine pour l’instant à se refermer. Comment dire à ceux qui ont tout perdu, ceux qui ont subi la violence, qu’il ne s’est rien passé ? Comment expliquer à ceux qui vivent depuis plus de trois mois coupés du monde que le retour à la normale est imminent ? Ne nous cachons pas la vérité. Rien ne sera comme avant, tant les émeutiers ont fait mal à la Calédonie. Mais cette vague de violence a également dévoilé une réalité. Alors que depuis de nombreuses années tout le monde s’accorde à dire que l’enchevêtrement des compétences est un mal calédonien, une question se pose : quelle est la seule collectivité qui a été en mesure de réagir immédiatement pour aider la population, sans attendre l’aide exceptionnelle de l’État ? La province Sud. Si nous avons pu réagir quelques heures après le début des exactions, c’est grâce à la bonne gestion menée depuis 2019. Le fait d’avoir réduit notre propre train de vie, d’avoir été la seule collectivité à avoir supprimer 150 postes et d’avoir ainsi redressé nos propres finances, nous a permis de jeter toutes nos forces dans la bataille pour être à vos côtés aux lendemains du 13 mai. C’est insuffisant, je le sais bien. Mais nous, nous étions là. Cette crise peut être aussi l’opportunité d’innover. Je pense par exemple à l’épineux cas de l’aide médicale, un dispositif assumé par les provinces pour le compte du gouvernement. Des ajustements simples et rapide à mettre en place, tels que la mise en place d’un numéro unique et d’une carte vitale pour les Calédoniens permettraient déjà d’économiser jusqu'à deux milliards de francs par an. Cela fait maintenant quatre ans que je le répète au congrès et en GTPE. Non, la vie d’après cette crise ne sera pas la vie d’avant. Elle ne le doit pas. Nous devons enfin nous interroger, réformer et améliorer notre système institutionnel dans son intégralité. Après tant de drames, les Calédoniens méritent cela de la part de ceux qu’ils ont portés aux responsabilités. Sonia Backès, Présidente de l’a semblée de la province Sud

4 #16La lettre d’information de la province Sud pour rester informé chaque semaine Abonnez-vous en suivant le lien : province-sud.nc/mon-compte SOMMAIRE S'unir pour bâtir un lendemain meilleur 6 Assurer la santé de tous, malgré les barrages 16 C'était il y aunan : les engagements duPrésident de laRépublique 34 3 Édito 5 Zoom sur : Nos étudiants accueillis en Métropole 22 Tous mobilisés pour la rentrée 30 CIDFE : les femmes reprennent leur destin en main 32 Offrir de l'insouciance dans les centres de vacances 33 Boucles de Tina : Des vélos volés finalement restitués 20 Navettes maritimes : une nécessité face à la crise

5 ZOOM SUR Fin août, 109 étudiants se sont envolés pour l’une de leurs plus belles aventures : celle des études supérieures en Métropole. Avant de rejoindre leur ville d’étude et les bancs de leur université, nos jeunes ont été accueillis à Lyon, les 18, 21, 25 ou 28 et 29 août, pour des journées d’ateliers organisées par le Bureau des Étudiants à Paris (BDE) et le Bureau de l’Accompagnement des Étudiants (BAE) de la province Sud. L’objectif : permettre à chacun d’entre eux, boursier comme non-boursier, « d’entreprendre ses études dans les meilleures conditions et revenir diplômé, chargé de belles expériences professionnelles » a soutenu Marie-Jo Barbier, élue provinciale et présidente de la commission de l’enseignement. À Lyon, nos étudiants prêts à voler de leurs propres ailes Rappels des démarches pour rejoindre sa ville d’étude, gestion de compte bancaire, rentrée universitaire, sécurité sociale, prise en charge médicale, ou encore souscription à un abonnement téléphonique… Au Centre international de Séjour de Lyon (C.I.S.L.), les étudiants ont été pris en charge par les équipes provinciales, soucieuses de revoir avec eux « toutes les démarches et toutes les informations pratiques et nécessaires pour les mettre sur les bons rails et commencer leurs études » assureMurielGermain, cheffe du projet. Pour l’ensemble de l’équipe, « ces étudiants sont comme nos enfants ». « Nous savons à quel point les départs sont difficiles et douloureux, d’autant plus dans le contexte que nous vivons. C’est dur pour eux comme pour nous, parents. Alors pour que chacun soit rassuré, nous avons à cœur de les accompagner et d’être au plus près d’eux avant qu’ils ne rejoignent leur ville d’études » souligne-t-elle. Entre calédoniens, on est solidaires. Hébergés au C.I.S.L. pendant trois jours, les étidiants ont pu également retrouver la chaleur du Caillou, plus soudés que jamais : « C’est rassurant de ne pas être seul et de voyager à plusieurs cerveaux… D’être accompagné et de savoir que l’on n’est pas tout seul, cela enlève beaucoup d’angoisses » témoigne Antonin, 18 ans. Un sentiment partagé par son jumeau, Marius : « Entre Calédoniens, on est solidaires. On apprend à se connaitre, donc c’est rassurant de savoir que l’on n’est pas seul. » Autre point essentiel, celui d’être « bien préparés à nous prendre en main pour gérer notre arrivée dans notre ville d’étude, notre budget, notre logement et nous aider dans nos démarches, donc c’est très pratique » souligne ce dernier, désormais prêt à rejoindre Grenoble pour y suivre une licence de Physique. Pour Emyline, 20 ans, qui s’apprête à suivre un diplôme d'État de Conseillère en Économie Sociale et Familiale, ces trois jours d’ateliers ont représenté « un gros soulagement » avant le grand saut : « À mon arrivée à Paris, j’ai été impressionnée par toute sa grandeur. Cet accueil groupé et ces ateliers nous ont considérablement aidés. C’est un gros soulagement avant de voler de nos propres ailes » confie-t-elle. En chiffres ● 109 étudiants accueillis (51 non-boursiers et 58 boursiers) Dates d’accueil : 18, 21, 25 ou 28 août à Lyon en raison des Jeux Olympiques de Paris. Les étudiants participant au dispositif de l’accueil groupé à Lyon ont pu bénéficier : ● d’une aide au transport pour se rendre à Lyon depuis Nouméa ; ● 3 jours d'ateliers ● du transfert de Lyon vers leur ville d’études; ● d'une prime unique d'installation de 150 000 F pour les primo-partants. FACEBOOK DU BDE DE PARIS

6 SUD'MAG #14 | Septembre 2024

Septembre 2024 | SUD'MAG #14 7 Laviede tous lesCalédoniensabasculé le13mai 2024, lorsquedesmilliers d’hommes ont décidé de semer la terreur et la destruction sur l’ensemble de l’agglomération nouméenne. De la stupéfaction et de la colère est née une solidarité jusqu’ici inconnue entre hommes et femmes. Ils se sont organisés spontanément pour résister face au chaos. Un courage collectif face à des actes odieux que la province Sud tente, avec ses propresmoyens, d’accompagner pour rebâtir. La vague de violence qui s’est abattue sur la province Sud, et plus particulièrement sur les communes du Grand Nouméa, avant de finalement atteindre la Brousse, a plongé l’ensemble de la Nouvelle‑Calédonie dans une crise économique et sociale sans précédent. Une destruction organisée et planifiée par une poignée d’extrémistes de la CCAT a mis notre pays à genoux. Le bilan, qui ne cesse de s’alourdir malgré l’omniprésence des forces de l’ordre actuelle, est effroyable. Tandis que la Nouvelle-Calédonie est une collectivité au bord de la faillite et ne survit que grâce à l’aide de l’État, déjà plus de 20 000 personnes ont perdu leur emploi, plus de 800 entreprises ont été détruites, et près de 200 maisons de Calédoniens ont été dégradées, incendiées ou pillées. Face à la terreur imposée par des individus manipulés par des indépendantistes radicalisés ou soutenus par des puissances étrangères, un grand nombre de Calédoniens se sont dressés pour résister, protéger leurs biens et leur famille, et tenter de sauver ce que des hommes ivres de haine n’ont pas pu leur prendre. Un élan de solidarité sans précédent qui s’est matérialisé par des barricades dans les rues et qui servira surtout à construire demain. Sans attendre, la province Sud a été la première collectivité, malheureusement la seule dans certains cas, à se mobiliser à leurs côtés. Dès les premiers jours, votre collectivité de proximité s’est mobilisée pour livrer aux populations les plus isolées, prises en otage par des barrages, des produits de première nécessité. Devant le mutisme du gouvernement calédonien, un numéro vert a été mis en place pour vous renseigner sur les dispositifs et aides d’urgence mis en place. Un centre médico-social provisoire a été installé dès le 20 mai en centre-ville pour gérer les urgences et les soins d’une population dans le besoin, ne pouvant plus se rendre au Médipôle. Rapidement, et face à la violence des délinquants s’étant retranchés dans la tribu de Saint-Louis, le seul axe permettant aux habitants du Mont-Dore Sud et de Yaté de rejoindre le reste de la Grande Terre a été une nouvelle fois bloqué. Dans le meilleur des cas, praticable mais avec le risque de subir un car-jacking, près d’une soixantaine rien qu’entre le 13 mai et le 13 juillet. La province Sud a immédiatement mis en place, dès le 13 mai, des navettes maritimes entre le Mont-Dore Sud et Nouméa. Un dispositif qui n’a cessé de se renforcer face à l’insécurité croissante sur laRP1, malgré l’intervention des forces de l’ordre. Devant l’urgence économique imminente et grâce à une gestion rigoureuse durant ces dernières années, la Province a réussi à maintenir les salaires de ses agents, pour la plupart mobilisées dès le début de cette tentative de coup d’État de force avorté. C’est aussi cette gestion qui a permis d’annoncer la mise en place d’une aide d’urgence pour les entreprises sinistrées en mai, avant que l’État ne prenne finalement le relais. Hier fut le temps de la destruction... Demain celui de la reconstruction Une batterie de nouvelles aides a été votée afin de permettre à ceux qui travaillent et à ceux qui ont vu leurs entreprises ou leurs logements dévastés de survivre. La Province a également œuvré pour tenter de retenir les médecins, frappés de plein fouet par ce climat d’insécurité, alors qu’une crise sanitaire sans précédent se profile après les violences de la CCAT et de ses complices. Tous ces dispositifs d’urgence ont un coût et nécessitent parfois de prendre des décisions cruciales, en témoigne le budget supplémentaire voté par l’assemblée de la province Sud le 15 juillet. « Hier fut le temps de la destruction… demain sera celui de la reconstruction », a assuré la présidente de la province Sud, Sonia Backès, lors de cette assemblée. Cette reconstruction ne pourra se faire sans une aide de l’État et surtout sans le travail des Calédoniens qui refusent de laisser la victoire à la violence. Ils pourront compter sur la province Sud. S’unir pour bâtir un lendemainmeilleur

8 SUD'MAG #14 | Septembre 2024 Au lendemain des exactions du 13 mai, le ravitaillement alimentaire est devenu une priorité. Certains magasins ont été brûlés et pillés, tandis que d’autres étaient fermés pour des raisons évidentes de sécurité. Des quartiers entiers du Grand Nouméa sont alors inaccessibles, barrés par des émeutiers organisés qui rackettent ou violentent les automobilistes selon leur envie, tout en menant leurs actions contre les forces de l’ordre. Si les habitants du sud de Nouméa peuvent encore se ravitailler dans les épiceries de quartier, quelques boulangeries et grandes surfaces ouvertes avec des horaires aménagés, d’autres administrés se retrouvent isolés en raison de la situation insurrectionnelle et dans l’impossibilité de nourrir leur famille. Cette situation frappe encore plus durement les populations déjà fragiles avant la crise. Le 19 mai, une équipe composée de volontaires s’est pourtant mobilisée en urgence pour la distribution de denrées alimentaires. En dépit du danger inhérent à la situation insurrectionnelle, la province Sud a estimé qu’il était de son devoir de venir en aide aux personnes les plus impactées. Du 19 au 26 mai, des distributions ont été effectuées à Tontouta, Katiramona, Païta, Sheffleras, Dumbéa, Tamoa et Nouméa. Assistance aux touristes bloqués sur le territoire et aux habitants exfiltrés Suite à la décision du haut-commissaire de la République de fermer l’aéroport international de La Tontouta, les vols internationaux ont été suspendus à partir du 14 mai. Des touristes se sont alors retrouvés dans l’impossibilité de rentrer chez eux. Durant cette période, la collectivité a hébergé 30 touristes en attente d’un rapatriement international. Une cellule de crise montée en urgence s’est chargée de la coordination et de l’accompagnement de ces touristes. Elle a également participé activement, aux côtés de l’équipe du haut‑commissariat, à leur rapatriement, ainsi qu’au rapatriement de ceux qui étaient bloqués sur l’île des Pins. En ce qui concerne les problématiques de mobilité, la collectivité a organisé des rotations maritimes pour acheminer des personnes de Nouméa vers les communes de l’intérieur de la Province. De plus, en collaboration avec la province Nord, elle a procédé au rapatriement de ses ressortissants de Koné vers Nouméa. Les exactions ont durement touché certaines familles des quartiers pris pour cibles par les émeutiers, comme à Kaméré et à la Vallée-du-Tir où des maisons de particuliers ont été brûlées, pillées, et vandalisées. Ces familles ont pu être relogées temporairement après leur exfiltration. Aide d’urgence pour les ressortissants de la province Sud bloqués à l’extérieur du territoire La fermeture de l’aéroport international de La Tontouta a également touché des Calédoniens bloqués à l'étranger ou en Métropole. En action dès les premiers jours pour répondre à la détresse

Septembre 2024 | SUD'MAG #14 9 Pour répondre aux difficultés rencontrées par les voyageurs impactés, la province Sud a apporté une aide financière exceptionnelle forfaitaire à ses ressortissants les plus précaires. Au total, 1 589 personnes ont bénéficié de cette aide, pour un montant total versé de 7,69 millions de francs. Ouverture d’une cellule de crise pour répondre aux questions les plus urgentes Dès le 22 mai, la Province a monté une cellule de crise ouverte 7 jours sur 7 en continu. Celle-ci a été opérationnelle pendant 3 semaines au plus fort des émeutes. La province Sud a pu maintenir, durant cette période, une continuité de service public. Sur le numéro vert, une dizaine d’agents provinciaux se sont relayés pour répondre aux questions des particuliers et des chefs d’entreprises. Ce centre d’appels répondait non seulement aux inquiétudes des personnes, mais orientait également vers les services compétents si nécessaire. Sa mission consistait à renseigner la population, souvent en détresse, sur les questions d’accès aux soins et aux magasins alimentaires, aux navettes maritimes et aux moyens de transport à Nouméa, dans l’agglomération et les communes de l’intérieur. Il renseignait également sur les aides exceptionnelles pour les petites et moyennes entreprises impactées. Au total, la cellule de crise a géré 1 527 situations individuelles, souvent des cas de détresse absolue. Silipeleto Muliakaaka, chargé d’études à la direction provinciale de l’Emploi et du Logement faisait partie des bénévoles qui ont assuré les distributions d’urgence : « Nous étions volontaires pour cette mission de distribution de denrées alimentaires. C’était assez dangereux car il fallait éviter certains barrages en feu. On a notamment reçu des coups de hache et de barre de fer sur la carrosserie de notre camionnette. Par moment, on avait la boule au ventre avant de passer les barrages où plus d’une quinzaine d’individus potentiellement dangereux étaient présents. Sur le pont à la sortie de Païta, on s’est retrouvés en plein échanges de tirs entre les émeutiers et les forces de l’ordre, on a dû rebrousser chemin en prenant la Savexpress en sens interdit ! Je crois que ces tournées de distributions alimentaires resteront à jamais gravées dans nos mémoires. Mais ce qui faisait chaud au cœur lorsqu’on arrivait sur les lieux de distribution, c’était de voir la joie et l’espoir dans les yeux des habitants. Ils nous remerciaient et demandaient si on revenait le lendemain. Cette mission m’a donné l’opportunité de participer activement à l’entraide et à la solidarité en cette période difficile pour la population calédonienne. » Les familles les plus impactées ont pu bénéficier des distributions alimentaires : ● 1,5 tonnes de riz, 750 kg de pâtes, ● 500 kg de sucre et 300 kg de farine ● 2 500 boîtes de conserves ● 921 paquets de couches bébé ● 252 boîtes de lait infantile ● 1 000 kg de légumes frais ● 400 lots de serviettes hygiéniques ● et 240 savonnettes La plateforme d’information de la province Sud SOS NC a été mise en ligne dès le début des émeutes, le 15 mai. Son objectif était de fournir des informations fiables et vérifiées. Cette plateforme qui est toujours actuellement accessible, dispose d’une cartographie qui, lors des premières semaines des exactions, informait la population sur les magasins d’alimentation, les stationsservices et les pharmacies ouverts ainsi que leur localisation. «On voyait la joie et l’espoir dans leurs yeux»

10 SUD'MAG #14 | Septembre 2024 Préserver à tout prix une économie frappée de plein fouet La frappe coordonnée des émeutiers, leur préparation et leur rapidité d’action face à des forces de l’ordre sous-dimensionnées pour faire face à ce type d’attaque ont provoqué des dégâts irréversibles. Rapidement, la sidération s’évapore et permet de dresser un premier constat terrible : l’outil économique est détruit. Au-delà des dégâts matériels colossaux, des milliers d’employés qui, grâce à leurs salaires, font vivre leurs familles viennent de voir leur outil de travail détruit. Chaque entreprise contribue par son activité à la richesse du territoire et au maintien du système de sécurité sociale. Face à l’urgence, la collectivité prend une fois de plus l’initiative et active une aide financière pour assurer les salaires du mois de mai des salariés d’entreprises impactées. Tout juste une semaine après les exactions, Sonia Backès, la présidente de l’assemblée de la province Sud, avait annoncé qu’un plan d’urgence serait mis en place pour maintenir les salaires des entreprises incendiées, pillées et ayant subi une perte de leur chiffre d’affaires. La province Sud adopte, dès le 24 mai, ce plan d’urgence pour les entreprises et les patentés. Nous n’avons jamais été aussi dépendants de l’État. « La Province prend le relais en urgence, permettant de financer le paiement de la masse salariale de cette entreprise », indiquait alors Sonia Backès. « Nous devions être réactifs, mais il est clair que nous avons besoin du soutien de l’État pour la suite, car cette mesure coûtera des centaines de millions. Nous ne pouvons tenir qu’un mois. Nous n’en avons jamais été aussi dépendants pour permettre aux Calédoniens de vivre. » Cette décision s’est concrétisée par la signature d’arrêtés. En parallèle, l’État a mis en place, en faveur des TPE et des PME, une mesure de soutien exceptionnelle pour les mois de mai et juin 2024, et a également financé un dispositif spécifique de chômage partiel adopté le 14 juin. Bruno Le Maire, le ministre de l’Économie et des Finances, avait assuré à la présidente de

Septembre 2024 | SUD'MAG #14 11 l’assemblée de la province Sud le soutien de l’État. Le 18 juillet, il annonce la prolongation du fonds de solidarité pour le mois de juillet et le déblocage de 18 milliards supplémentaires pour la Nouvelle-Calédonie. Le sujet calédonien devient une « urgence » qui autorise le ministre de l’Économie et des Finances à prendre des décisions pour accompagner la Nouvelle-Calédonie dans cette crise, alors que l’Assemblée nationale est dissoute et que le gouvernement de la République passe en gestion des affaires courantes. Clôturé le 24 juin, le plan d’urgence a permis le versement, fin mai, de « 1,014 milliard de salaires pour 5 700 employés », a rappelé Sonia Backès. « Je veux remercier les agents de la Province qui n’ont pas ménagé leur peine, week-ends compris, pour permettre que ces aides soient le plus rapidement possible sur le compte des entreprises. » Sur ces 1,014 milliard de francs, l'État en a remboursé la moitié à la Province. 1er bilan économique des exactions : ● 800 entreprises détruites intégralement ou partiellement ● 25 % du PIB impacté ● 30 % du capital productif du pays a été touché ● 20 000 salarié au chômage partiel ou total

12 SUD'MAG #14 | Septembre 2024 Un budget de crise centré sur les priorités absolues Deux mois après le début de la crise sans précédent, la province Sud s’est réunie en assemblée avec des cartes rebattues. Si, grâce à des finances redressées en moins de 5 ans, la collectivité a pu répondre à l’urgence absolue avec la mise en place de dispositifs d’aides aux entreprises mais également la réactivation d’une liaison maritime entre le Mont-Dore Sud et Nouméa, le vote du budget supplémentaire de l’exercice 2024 est devenu un vote de crise. Cette assemblée, qui s’est déroulée le 15 juillet, a rendu compte des lourds impacts sur les ressources de la Province depuis le début des exactions, à commencer par la fiscalité additionnelle qui n’est plus versée par le gouvernement depuis 2 mois, et qui est en baisse prévisionnelle de plus de 3 milliards de francs. Conjuguées aux retards chroniques de versement des dotations par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, ces exactions ont sapé les capacités financières de la collectivité, qui a pourtant décidé de maintenir le fonctionnement de ses services publics, de soutenir le monde économique et les familles, victimes de ces violences insurrectionnelles. Lors des échanges animés qui ont précédé le vote du budget supplémentaire, la présidente a tenu à remercier les élus favorables à ce budget supplémentaire qui permet de continuer à financer les mesures d’urgence pour soutenir les Calédoniens durant cette crise. Les élus de la majorité ont ensuite répondu aux critiques évoquant la marginalisation de la population. « Comment la province Sud a pu marginaliser une partie de la population alors que pendant des décennies, la population n’a cessé de s’y rendre pour bénéficier de ses politiques sociales, éducatives et économiques ?, s’est étonnée Virgine Ruffenach, élue de la province Sud. Cette Province a fait en sorte que ses concitoyens viennent s’y installer. Aujourd’hui nous n’avons plus les moyens d’assurer ces services proposés. » Ceux qui ont détruit, ont porté atteinte à leur propre population, car il n’y a plus d’argent pour financer ces politiques très généreuses… Le 1er vice-président de la collectivité, Philippe Blaise, a quant à lui, a rappelé que la province Sud n’a pas hésité à investir dans ses politiques sociales et de l’emploi : « Depuis le début, on s’est battu pour maintenir les fondamentaux de la politique sociale, alors que nous devons soutenir 75 % de la population avec une clé de répartition de 50 %. Cette crise que l’on subit n’est pas la conséquence d’un manque d’actions. En revanche, ce sont les décisions politiques de mettre à mal l’économie et de la détruire qui ont des conséquences. Cela a brisé les recettes fiscales de la Nouvelle-Calédonie. Ceux qui ont détruit, ont porté atteinte à leur propre population, car il n’y a plus d’argent pour financer ces politiques très généreuses… Aujourd’hui, nous sommes obligés de faire des choix que nous n’avons pas souhaités. C’est un budget de crise, d’économie de guerre, qui s’impose à nous et que l’on n’a pas voulu. D’où nos propositions et mesures qui, nous l’espérons, pourront aider les victimes, ces milliers de Calédoniens, ces entreprises détruites, ces gens dont les maisons ont été brûlées ou pillées. » Une batterie de mesures a donc été votée afin de venir en aide aux victimes des exactions. Pour les soutenir, l’exécutif provincial a mis en place un dispositif d’aide financière exceptionnel. Ce dispositif permet en effet d’obtenir une aide

Septembre 2024 | SUD'MAG #14 13 Économies réalisées La province Sud est l’une des rares à avoir assaini ses finances en supprimant notamment 150 postes et en réalisant des économies drastiques sur ses frais de fonctionnement depuis 5 ans. Cette gestion, en réduisant son train de vie, a permis à la collectivité de réagir immédiatement pour venir en aide à l’économie. financière, et un accompagnement social (lire page 14). Afin de contribuer à la survie des entreprises qui n’ont pas encore fait l’objet d’actes de vandalisme ou qui sont encore en activité, l’assemblée de la province Sud a voté un dispositif exceptionnel d’aide à l’embauche du personnel. « Cette aide a pour vocation d’aider les entreprises à préserver leurs locaux d’exactions jusqu’au rétablissement de l’ordre public », explique Nicole Pehau, directrice adjointe du Développement Économique et du Tourisme (DDET). « Elle leur permet de recruter à temps partiel ou complet pour une durée de six mois un salarié rémunéré jusqu’à 1,3 % du salaire minimum garanti, et la prise en charge par la province Sud de 80 % de son salaire mensuel brut dans la limite de 130 000 F par mois. » Cette aide limitée à deux embauches par entreprise, peut être sollicitée jusqu’au 30 novembre 2024. Ce dispositif devrait permettre la création d’une centaine d’emplois. Sa visée est avant tout sociale. En effet, l’objectif est double : proposer des emplois de transition aux personnes ayant perdu leur travail en attendant de trouver un emploi stable mais aussi permettre aux entreprises d’avoir un renfort d’effectifs afin que leurs employés ne soient pas contraints de rester sur place la nuit pour garder les locaux. Durant cette assemblée du 15 juillet, Gil Brial, 2e vice‑président de la province Sud, a exhorté l’opposition à voter ce budget, vital pour tant de Calédoniens : « cela fait deux mois que les entreprises ont brûlé, cela fait deux mois que les personnes ont perdu leur toit, ces mesures permettront aux familles de se reconstruire. À un moment, nous devons prendre des décisions, parce que deux mois, c’est déjà de trop pour ces milliers de personnes. » EN VIDÉO

14 SUD'MAG #14 | Septembre 2024 C’est l’une des mesures fortes votées lors de l’assemblée de Province le 15 juillet dernier : l’aide aux familles dont le logement principal a été détruit ou vandalisé traduit la ferme volonté de l’exécutif de soutenir les victimes des exactions, parmi lesquelles des centaines de Calédoniens qui ont vu leur logement partir en fumée ou être saccagé depuis le début des exactions. Pour les soutenir, la province Sud a mis en place un dispositif d’aide financière exceptionnelle. Ce dernier implique un soutien financier pouvant aller jusqu’à 3 millions de francs et un accompagnement social. Selon Marie Benzaglou, directrice de la direction du Logement et de l’Emploi (DEL) de la province Sud, « on estime entre 150 et 200 le nombre de familles concernées par ce dispositif. » « Certains logements ont été rendus inhabitables, obligeant les familles à les quitter dans des conditions très douloureuses et nombre de ces familles se retrouvent financièrement démunies et psychologiquement fragilisées, détresse parfois accrue par la perte simultanée de leurs emplois, ajoute Cyril Mestre, chef de service adjoint au service de la stratégie et de la production (SSP). C’est en ce sens que la province Sud a souhaité apporter un soutien à la fois financier et social au travers d’un dispositif dématérialisé pour faciliter les démarches. » Une aide de 3 millions de francs et une écoute attentive aux besoins Cette aide d’un montant maximal de 3 millions de francs, est destinée aux travaux de mise en sûreté ou de remise en état du logement, aux achats de mobiliers et aux dépenses d’hébergement d’urgence. Les dépenses en lien avec cette aide devront être justifiées par le bénéficiaires au bout d’une année. Les familles bénéficient également, à leur demande, d’un accompagnement social avec un travailleur social de la DEL. « Cet accompagnement consiste à accueillir et à écouter les familles dans le cadre d’entretiens personnalisés. Il permet d’identifier les démarches à réaliser auprès de différents partenaires (bailleurs, banques, CAFAT, assurances…) et oriente les victimes vers des services spécialisés en fonction des difficultés identifiées », explique Cyril Mestre. Dans ces épreuves douloureuses, une dizaine d’agents provinciaux se mobilisent pour vous apporter un soutien technique, administratif, psychologique et financier dans le cadre de cette aide qui dispose d'une enveloppe de 450 millions de francs. Contact pour plus d’informations : Direction de l’Emploi et du Logement Tel : 20 36 00 Redonner l’espoir à ceux qui ont tout perdu DISPOSITIF D’AIDES

15 Septembre 2024 | SUD'MAG #14 Pour mettre en place des aides concrètes et faire face à la détresse dans laquelle ont été plongés un très grand nombre de Calédoniens, les élus de l’assemblée de la province Sud ont été contraints de faire des choix face à un manque de ressources criant. « C’est unbudget supplémentaire inédit puisqu’il prend en compte d’ores et déjà la baisse de la fiscalité additionnelle », précise Nicolas Pannier, Secrétaire général de la province Sud. « Nous avions eu l’année dernière un peu plus de 8 milliards de francs. Cette année, les estimations sont de l’ordre de 5 milliards. Il nous a donc fallu prendre en compte cette baisse de 3 milliards de fiscalité additionnelle. Il nous faut également prendre en compte la fiscalité de répartition, qui, elle aussi, nous est versée par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et qui sera à la baisse. Nous avons donc commencé à constituer une provision d’un montant de plus de 3,5 milliards de francs. Dans les premières projections qui nous sont annoncées à propos de ce budget de répartition, nous estimons à 7,8 milliards de francs les économies supplémentaires que nous devrons réaliser, soit de nouveaux efforts plus que considérables. » Lors du vote également, la Nouvelle-Calédonie devait plus de 8 milliards de francs à la Province. La Cafat devait également s’acquitter d’un remboursement de près d’1 milliard. De quoi mettre, malgré une gestion jusqu’ici saine et des finances redressées, la trésorerie de l’institution en difficulté. « Nous avons donc mis en place trois mesures d’économie qui ont été réalisées, indique la présidente de la province Sud. La première concerne les bourses et l’accès au logement social : nous passons à une obligation de 10 ans de présence pour y avoir accès. » La province Sud n’a plus les moyens de payer seule ces bourses. Sonia Backès indique avoir constaté que beaucoup de bénéficiaires de ces deux dispositifs étaient souvent arrivés récemment en province Sud, mais étaient en fait souvent originaires des deux autres provinces. « La province Sud n’a plus les moyens de financer seule ces bourses, poursuit la responsable. Les personnes étant présentes depuis moins de 10 ans en province Sud pourront néanmoins bénéficier des bourses du Nord et des Îles. » Des économies ont également été mises en place pour le minimum vieillesse, pour lequel les enfants sont à présent appelés à participer, comme cela se fait déjà en Métropole. « Jusqu’à présent, nous avions une partie de la population qui ne déclarait aucun revenu ou qui assurait être en incapacité d’aider ses parents, explique Sonia Backès. À présent, cette obligation alimentaire s’applique désormais à tous dans la mesure de ses moyens, ce qui va baisser le montant du minimum vieillesse versé par la Province. » Enfin, la modification relative à l’aide médicale, avec la réinstauration d’un ticket modérateur à 20 %, contre 10 % actuellement (lire en page 20), devrait également permettre de réaliser des économies substantielles. Desmesures d’économies pour pallier les manques à venir

16 SUD'MAG #14 | Septembre 2024 Routes bloquées, incendies, tirs, car-jacking... Depuis le début des émeutes, les Mondoriens sont pris en otage, privés de leur liberté de circuler. Leur détresse entendue, l’exécutif n’a pas attendu pour déployer le dispositif d’urgence des navettes maritimes au lendemain des exactions, avec pour objectif d’aider nos concitoyens à rejoindre leur lieu de travail, à s’approvisionner ou à accéder aux soins. Déployé dès le 13 mai au soir par la province Sud en lien avec le SMTU, ce dispositif d’urgence compte en moyenne « 300 rotations par jour pour près de 4 000 Mondoriens » assure Frédéric Glavieux, chef de service du SIAP (Service des Infrastructures Aéronautiques et Portuaires) de la province Sud. Depuis le début des violences, les routes sont inaccessibles et les Mondoriens, fortement éprouvés, font preuve d’une exceptionnelle résilience : « Au lendemain des exactions, malgré le couvre-feu qui était instauré de 20 heures à 6 heures, de nombreux habitants du sud du Mont-Dore commençaient leur journée à 4 heures du matin pour tenter de prendre la première navette de 6h30 au wharf de La Corniche du Vallon Dore » relate Frédéric Glavieux. Aujourd’hui encore, ces derniers ne peuvent compter que sur ce dispositif d’urgence pour se déplacer, se soigner, ou encore se ravitailler. Face à l’urgence de cette situation insoutenable, la province Sud a tout fait pour renforcer son dispositif, notamment pour « réduire le temps d’attente des usagers qui pouvait atteindre jusqu'à deux heures aux heures de pointe » explique Frederic Glavieux avant d’ajouter : « Avec la reprise progressive du travail, la Province a révisé son dispositif avec la mise en service d’un navire plus grand de 96 places dès le 29 mai 2024. Le 5 juin, quatre autres petites navettes ont été ajoutées au dispositif pour tenter de réguler les flux au départ du Vallon Dore. La province Sud a également procédé à des travaux de renforcement du wharf de la Corniche (sous la compétence du SMTU) afin de permettre, à partir du 17 juillet, des rotations du Mary D Princess (132 places) pour renforcer son dispositif d’urgence. Un système d'attente a également été mis en place pour protéger les usagers en cas de pluie. » Le MARYD pour renforcer la flotte de 12 taxi-boats, un bateau et le Coral Palms Le 17 juillet, le Mary D Princess rejoignait la flotte. Ce même jour, la présidente de l’assemblée de Province et l’élue Nina Julié NAVETTES MARITIMES Les navettes d’urgence pour ne pas oublier lesMondoriens

Septembre 2024 | SUD'MAG #14 17 s’étaient rendues à quai pour rencontrer les Mondoriens et saluer les équipes sur place qui assurent la sécurité des passagers et le bon déroulement des rotations. Selon Nina Julié, « il était important de partager avec les Mondoriens leur satisfaction d’avoir à disposition le Mary D qui permet de fluidifier davantage les transports et de réduire le temps d’attente ». L’élue a toutefois rappelé que : « si chacun comprend ici que la province Sud fait tout son possible pour venir en aide aux victimes, la véritable façon de les aider c’est de sécuriser la route des Mondoriens qui se retrouvent pris en otage par les émeutiers qui bloquent les routes, qui mettent le feu et qui sont aujourd’hui les responsables de cette situation. » L’action solidaire de la province Sud s’est également exprimée à l’échelle de ses directions et de ses agents qui ont fait preuve d’un formidable élan de solidarité en soutien aux Mondoriens : le 7 août dernier, une collecte de dons a été lancée pour répondre aux besoins des familles touchées de plein fouet par les conséquences des exactions. Jeudi 22 août, des centaines de dons, denrées alimentaires, vêtements et produits de première nécessité ont été livrées à l’Association Citoyen Mondorien au Warf du Vallon Dore. Des denrées qui représentent « un petit rayon de soleil pour de nombreuses familles qui se retrouvent dans le besoin suite aux exactions, à la perte d’entreprise et aux licenciements » selon Jean-Luc Chevalier, trésorier de l’association. Reconnaissant, ce dernier a vivement remercié les agents provinciaux pour leur générosité et la province Sud pour l'aide portée à nos concitoyens. Dans ce contexte de crise inédite, le transport maritime a offert une alternative. Sans attendre, la province Sud a fait tout ce qui était en son pouvoir pour répondre à la détresse des Mondoriens. Cependant, bien que ce dispositif puisse constituer une solution, il ne saurait remplacer le droit de circuler librement et en toute sécurité.

18 SUD'MAG #14 | Septembre 2024 Pour répondre à la crise, Il faut en avoir les moyens Dans un contexte insurrectionnel inédit, la province Sud a mis en place une série d’aides et de dispositifs destinés à venir en aide aux victimes. Mais ce travail d’assistance à la population, d’amélioration du quotidien des Calédoniens, ne date pas d’hier. Depuis maintenant cinq ans, au fil des crises successives que la Nouvelle‑Calédonie a pu affronter, l’institution a fait en sorte de répondre présent grâce aux efforts entrepris depuis le début de la mandature. La province Sud est ainsi devenue le premier investisseur public de Calédonie, jusqu’à ce que la destruction organisée de l’économie ne soit lancée le 13 mai. Voici les investissements réalisés ces dernières années et ceux engagés que nous espérons reprendre au plus vite. Une politique sérieusement mise à mal par la vague de violence orchestrée ces derniers mois, mais que nous n’abandonnerons pas, tant elle est essentielle pour le quotidien des Calédoniens.

19 Septembre 2024 | SUD'MAG #14

20 SUD'MAG #14 | Septembre 2024 Assurer la santé de tous, malgré les barrages des émeutiers Les émeutiers rendant impossible l’accès au Médipôle, il a fallu réagir. La province Sud a ainsi ouvert un centre médical en urgence pour les populations les plus démunies face à la situation, puis a progressivement rouvert tous ses dispensaires, dans des conditions parfois dégradées. Mais parfois, la violence a eu raison de tous les efforts déployés. Le manque d’accès aux soins a bien plus tué que les violences perpétrées par la CCAT. Durant de nombreuses semaines, des centaines de patients n’ont pas pu se rendre auMédipôle, dont l’accès est longtemps resté bloqué par les émeutiers. Afin d’éviter, ou plutôt de contenir une catastrophe sanitaire, la province Sud a tenté d’apporter une réponse aux besoins de la population. « L’objectif était de pouvoir ouvrir le plus rapidement possible un centre de soins après une semaine d’émeutes qui avaient mis à mal l’offre de soins privée et publique et la santé des populations », rappelle Jean-Baptiste Friat, directeur de la Direction Provinciale des Affaires Sanitaires et Sociales (DPASS). « Nous avions également à cœur de pouvoir proposer une réponse complète avec l’ensemble des métiers et professionnels présents dans les équipes provinciales : infirmières, puéricultrices, sages-femmes, médecins mais aussi des psychologues et des travailleurs sociaux pour accompagner la détresse psychologique et sociale avec un numéro vert dédié. » Le 20 mai, la DPASS a ouvert l’Espace Santé à Nouméa. Une équipe provinciale s’est mobilisée pour assurer des soins relevant de la médecine générale et de la protection maternelle et infantile. 50 à 100 personnes par jour Les patients ont pu consulter, renouveler leurs ordonnances et refaire leurs pansements. Il poursuit : « L’Espace Santé a été ouvert au public comme un lieu de prise en charge globale des personnes requérant des soins somatiques et psychologiques. L’Espace Santé a accueilli durant cette période entre 50 et 100 personnes par jour pendant plusieurs semaines avant la réouverture progressive des autres centres de l’agglomération (Païta, Montravel puis Dumbéa sur Mer). » Avant le début des exactions, chacun des 11 centres médico‑sociaux répartis sur l’ensemble du territoire provincial disposait d’au moins un médecin. De quoi assurer un maillage efficace pour assister sa population. Mais les violences ont démantelé ce dispositif qui avait mis tant de temps à être construit. Le 24 juillet, la collectivité a dû se résoudre à annoncer la fermeture du CMS de Thio. Après le départ d’un cinquième médecin en deux mois, c’est au tour du reste du personnel soignant de jeter l’éponge. Les agressions incessantes à leur encontre et la violence omniprésente dans le village justifient cette décision, et plus aucune politique incitative menée par la province Sud ne permet de retenir le personnel. « Avec les agressions, les routes difficiles et l’accès très compliqué, la population de Thio est en grand danger. Les patients chroniques vont en souffrir le plus », déplorait Patricia Pèdre, directrice adjointe de la DPASS. Retenir nos spécialistes libéraux Les élus de la province Sud ont voté le 15 juillet la modification du dispositif d’incitation à l’installation et du dispositif d’aide à l’équipement ouau rééquipement desmédecins et des chirurgiens-dentistes libéraux : l’aide prévue est de 3 millions de francs. Elle peut à présent être majorée à 8 millions en cas de regroupement. Le 23 août, la province Sud a signé l’acte d’acquisition du cabinet médical « Espace Santé de la Corniche » situé au Vallon-Dore. Cette acquisition permet à la collectivité de mettre ces locaux à disposition des professionnels de santé et d’instaurer une permanence médicale le weekend. Ce projet est le fruit d’un travail de coordination entre différents partenaires et l’État qui met à disposition une équipe composée d’un médecin et d’un infirmier de la Sécurité civile.

Septembre 2024 | SUD'MAG #14 21 Une suspension des paiements de l’aide médicale en attendant d’être remboursé soi-même Les conséquences financières des exactions débutées le 13 mai dernier et les retards de paiement de ses dettes par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne permettent plus à la province Sud de prendre en charge les ressortissants de l’aide médicale pour les soins effectués à partir de lundi 15 juillet prochain. » L’annonce de la présidente de la province Sud a été faite le 11 juillet. Privée de ces ressources, l’institution a dû choisir entre payer ses agents ou maintenir ce dispositif pour une partie de la population, qui peut néanmoins continuer de se rendre dans les centres médico-sociaux. « L’aide médicale coûte à la province 5,4 milliards de francs par an, que nous avons toujours payés dans les temps. Mais la difficulté, c’est que sur un budget de la province de 59 milliards de francs, nous avons à présent 9 milliards dehors. C’est-à-dire que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie nous doit 8 milliards et la Cafat 1 milliard, » a expliqué Sonia Backès lors de l’assemblée de Province qui s’est tenue le 15 juillet. Une décision inévitable donc, prise par la province des Îles un an plus tôt, mais qui reste temporaire. Le financement de ce dispositif, revenant normalement dans le champ des compétences de la Nouvelle‑Calédonie d’après le Conseil d’État, reprendra dès que les remboursements des sommes dues par les autres collectivités seront honorés. Des changements pour le ticket modérateur Lors de cette même assemblée, les élus de la province Sud ont également acté l’augmentation du ticket modérateur pour les bénéficiaires de cette aide, passant de 10 à 20 %. Pour une consultation à 4 300 francs, un bénéficiaire de l’aide médicale devait payer 430 francs et le médecin se faisait rembourser le reste. Demain, il devra payer 860 francs. Mais des cas particuliers sont à exclure : par dérogation, un taux réduit de ticket modérateur (10 %) est appliqué au bénéfice des femmes enceintes, ainsi que des enfants jusqu’à leur troisième anniversaire et des personnes en maladie de longue durée. Tout le reste des dépenses, comme les dialyses, les pharmacies ou les traitements pour le cancer, continuera à être pris en charge à 100 %. Les personnes en situation de handicap, en établissement de santé, bénéficiant de l’aide sociale, et les anciens combattants sont quant à eux toujours exonérés de frais. « Cela ne peut pas continuer comme ça et ce qui est complètement absurde, et que nous dénonçons depuis cinq ans, c’est qu’il y ait quatre systèmes de feuilles de maladie, rappelle la présidente de la province Sud. Concrètement, une personne bénéficiant de l’aide médicale va chez son médecin, qui tape sur son ordinateur la feuille de maladie, imprimée, qui arrive ensuite soit à l’une des trois provinces, soit au Ruamm. Puis, les agents saisissent manuellement la feuille de maladie et remboursent. Or, ce système devrait être une boîte unique pour la Nouvelle-Calédonie avec une carte vitale, où le médecin n’aurait qu’à entrer les données numériquement avant d’être ensuite remboursé. Si nous fusionnions ces quatre systèmes, nous économiserions 2 milliards et la carte vitale permettrait d’économiser 20 % des dépenses de maladie. Cela fait quatre ans que je le dis au Congrès. » Privée de ressources par le gouvernement,, la province Sud a dû faire un choix extrêmement difficile et cesser temporairement de financer l’aide médicale. Si la compétence de la santé revient au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, le dispositif est supporté par les provinces. Des collectivités qui peinent justement à obtenir les financements qui leur sont dus par… ce même gouvernement. Des solutions existeraient bel et bien pour réformer efficacement ce système. Mais, comme d’autres domaines, rien n’est fait.

22 SUD'MAG #14 | Septembre 2024 Incendies, dégradations, fermetures temporaires ou définitives, les écoles aussi ont payé le prix fort des violences insurrectionnelles. Elles ont pourtant rapidement relevé la tête, accueillant à nouveau leurs élèves après seulement quelques semaines, ou parfois quelques mois. Ainsi à l’heure où nous rédigeons cet article, grâce au partenariat efficace communes‑province Sud, tous les élèves (excepté à Thio) peuvent de nouveau être accueillis dans une école. Comment les enfants et les équipes ont-ils été accompagnés, après le choc, vers cette reprise des cours, qu’elle soit rapide, progressive ou même, parfois, delocalisée ? Priorité à la continuité des enseignements Une fois la question de la sécurité réglée, l’enjeu principal consistait à éviter une rupture scolaire chez les petits écoliers, en maintenant autant que possible une continuité pédagogique, quelle que soit la situation de leur école. En effet, certains établissements ont pu rouvrir seulement 5 semaines après le début des exactions, et ont souvent privilégié une reprise en douceur avec des temps d’échange, de jeux et d’activités collectives. Pour les écoles et quartiers qui ont été plus durement touchés, d’autres solutions ont été mises en place. Ainsi, dès le 5 juillet, pour pallier la fermeture de certains établissements, neuf écoles ont accueilli un dispositif d’accompagnement à la continuité pédagogique. Au total, 120 élèves ont ainsi pu aller temporairement en cours dans une école plus accessible que la leur, au sein d’une classe multi-niveaux dédiée. Aujourd’hui, tous les élèves concernés par la fermeture de leur école ont pu être durablement réaffectés dans d’autres établissements et peuvent poursuivre leur scolarité normalement. « Environ 1 500 élèves ont perdu leur école à la suite des incendies et dégradations. Ils ont tous pu être réorientés vers d’autres établissements, avec, dans la mesure du possible, le maintien de leur enseignant », détaille Florence Seytres, directrice de l’Éducation et de la Réussite (DERES) de la province Sud. « Les écoles ont veillé à favoriser l’intégration et la cohésion avec, par exemple des évènements fédérateurs, comme la fête du sport qui s’est tenue le 1er août à Dumbéa au sein du groupe scolaire Alphonse‑Dillenseger, qui accueille certains élèves de l’établissement Louise‑de‑Greslan ». Une série de mesures pour un retour serein Pouvoir se rendre de nouveau à l’école, c’est déjà une belle avancée, mais comment y aller le cœur léger après tout cela ? Pour faciliter cette transition, la province Sud et sa direction de l’Éducation et de la Réussite ont mis en place une série de mesures, afin d’accompagner au mieux les équipes et les enfants dans cette rentrée atypique : Pour un retour serein sur les bancs de l'école Les écoles maternelles et élémentaires ont été au cœur des dommages subis lors des exactions. Les murs colorés ont été tagués, les salles de classe et leurs petits bureaux ont été saccagés et, parfois même, les locaux entièrement brûlés. Pour les équipes pédagogiques et les élèves, le choc a été immense. Pourtant, il a bien fallu retrouver le chemin de l'école... Mais comment réussir cette rentrée après cela ? Les équipes provinciales ont déployé toute leur énergie pour organiser la continuité des apprentissages, relocaliser les classes et accompagner élèves comme enseignants dans cette reprise si singulière...

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