SudMag, octobre 2025

16 | SUD'MAG #29 | Octobre 2025 Ils sont l’un des visages les plus concrets de la santé publique. Dix centres médico-sociaux (CMS) maillent aujourd’hui la province Sud, de Nouméa à Yaté, en passant par l'île des Pins, Bourail ou Thio. Discrets, ces lieux incarnent une idée simple et pourtant essentielle : permettre à chaque habitant, où qu’il vive, d’accéder à un soin ou un accompagnement. Début septembre, la commune de Thio a retrouvé un médecin. Installé pour quatre mois au CMS, il sera assisté par une infirmière du réseau itinérant de la province Sud. Pour le docteur Guédon, « les patients ont droit aux soins, quelle que soit la petite commune isolée qu’ils habitent. Donc on va essayer de faire le maximum ». Depuis un an, la commune ne bénéficiait que d’une visite de médecin par semaine. Un bus affrété deux fois par semaine transportait aussi les patients vers La Foa ou Boulouparis. Si tous les dispensaires de la province Sud sont désormais pourvus, les contrats restent courts et la sécurité demeure préoccupante. « C’est compliqué de recruter en province Sud notamment sur trois zones : l’île des Pins, Thio et Yaté, explique Patricia Pèdre, directrice adjointe de la DPASS. Parce que leur réputation est quand même très abimée. J’espère que l’on pourra rapidement tourner la page et que tous retrouveront des soins adaptés. » Le lien établi avec le CMS de La Foa va perdurer avec des visites maintenues tous les jeudis, et également en tribus plus isolées. Depuis juillet 2024, le CMS avait malheureusement été déserté par les professionnels de santé par mesure de sécurité. Les CMS, ce sont des portes ouvertes sur la vie quotidienne : on y vient pour un vaccin, une consultation de suivi, une aide sociale, un conseil de nutrition, une écoute psychologique. Médecins, infirmiers, assistants sociaux, éducateurs, sages-femmes, psychologues : ces équipes pluridisciplinaires prennent en charge les familles, les personnes âgées, les jeunes, les précaires, tous ceux qui ne trouvent pas leur place dans le circuit hospitalier ou libéral. En Brousse, leur rôle est vital. À Yaté, Thio ou Bourail, ils sont parfois le seul recours médical à moins d’une heure de route. Comme tout le système de santé calédonien, les CMS ont été fragilisés par les événements de mai 2024. Plusieurs structures ont dû fermer temporairement, parfois endommagées, toujours privées de personnel. Depuis, la réouverture s’est faite progressivement et souvent à horaires réduits : le CMS de Païta a repris du service fin mai, celui de Dumbéa-sur-Mer en juin, tout comme Montravel et Boulari. Ces réouvertures symbolisent la volonté de la province Sud de reconstruire la santé de proximité avant tout. « Même avec des moyens réduits, il fallait rouvrir vite. C’est dans les CMS que les gens retrouvent un interlocuteur, un repère », confie Jean-Baptiste Friat, directeur de la DPASS. Au-delà du retour à la normale, la Province a engagé une modernisation en profondeur. Le nouveau CMS de Thio, inauguré récemment après 120 millions de francs de travaux, en est l’exemple le plus visible. Bâtiment climatisé, accessibilité PMR, salle de soins polyvalente, espace d’accueil social : la structure illustre une vision renouvelée de la santé territoriale. D’autres CMS ont été rénovés ou réorganisés, notamment à Dumbéa-sur-Mer, où la Direction de l’emploi et du logement (DEL) a intégré les locaux. Objectif : créer un guichet unique regroupant santé, logement, insertion et accompagnement social. Cette approche intégrée préfigure ce que la Province appelle déjà «le modèle CMS 2.0» : des lieux ouverts, polyvalents, capables de répondre aux besoins concrets du quotidien. Une équipe, mille missions. Chaque CMS est un petit monde en soi. Les équipes accueillent les enfants pour les visites scolaires, vaccinent les seniors, accompagnent les femmes enceintes, soutiennent les familles en difficulté, orientent vers des aides sociales. Les CMS de Nouméa et du Grand Nouméa (Montravel, Kaméré, Boulari, Païta) absorbent la majorité du flux, tandis que ceux de l’intérieur (La Foa, Bourail, Thio, Yaté) jouent le rôle de sentinelles du territoire. Dans un contexte de pénurie de soignants, maintenir ces structures en activité relève presque du défi. La province Sud s’appuie sur le dispositif d’incitation à l’installation pour attirer des praticiens qui exerceront en partie dans les CMS. À terme, la collectivité veut renforcer le lien entre CMS et téléconsultation, pour pallier le manque de spécialistes et assurer la continuité des soins, notamment pour les patients chroniques. Reste à leur donner les moyens humains d’exister pleinement. Car sans médecins, sans assistantes sociales, sans infirmiers, les murs rénovés ne suffiront pas. Mais pour beaucoup de familles, un CMS qui rouvre, c’est déjà une forme de retour à la normalité. Dans un territoire qui panse encore ses plaies, les CMS ne soignent pas seulement les corps : ils recousent la société. CENTRES MÉDICO-SOCIAUX, la santé de proximité reprend souffle Trois internes dès novembre Trois internes en médecine générale seront accueillis en province Sud du 3 novembre 2025 au 3 mai 2026 dans le cadre de leur stage ambulatoire en soins primaires autonomes (SASPAS). Rémi Gachet sera affecté à l’UPASS de Bourail, Castille Gerbouin rejoindra l’UPASS de La Foa et Estelle Minvielle-Lavigne exercera au CMS de Païta. Leur présence permettra d’apporter un renfort médical de proximité dans ces communes, tout en leur offrant une expérience de terrain essentielle pour leur formation. La province Sud prend en charge l’ensemble des frais liés à leur accueil : un aller-retour en avion entre leur CHU de rattachement et la Nouvelle- Calédonie, sur la base d’un tarif économique, un logement avec charges comprises ou une indemnité compensatrice plafonnée à 63000 F par mois, ainsi que l’indexation de leur rémunération pouvant atteindre 300000 F par mois. Les frais de déplacement engagés lors des missions sont également remboursés et les gardes et astreintes indemnisées conformément à la réglementation. Ces dépenses, qui figurent au budget 2025 de la province Sud, s’inscrivent dans un dispositif toujours en vigueur qui vise à soutenir la formation médicale, à renforcer l’accès aux soins pour la population et à encourager l’installation durable de jeunes praticiens sur le territoire.

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