SudMag, octobre 2025

18 | SUD'MAG #29 | Octobre 2025 ACTUALITÉS Le 4 septembre dernier, l’école Heinrich Ohlen à Païta a ouvert ses portes aux familles pour une journée pas comme les autres, autour d’un sujet qui nous concerne tous : l’usage des écrans et leurs dangers. Problèmes de concentration, de motricité, retard de langage, fatigue… « Tout est parti de ce constat, explique la directrice, Varinka Song. Nous avons donc choisi de mener ce projet qui a permis à chaque classe de réaliser un travail d’écriture sur ce thème. Cette journée portes ouvertes est l’occasion de partager le fruit de ce travail avec les parents, afin de les intégrer pleinement au projet, car cela passe aussi par la maison ». La journée a débuté par un café-partage avec les familles, avant de se poursuivre par des échanges riches sur les bienfaits, les dangers, mais aussi les alternatives possibles aux écrans. Les équipes pédagogiques, les familles et les partenaires – parmi lesquels les équipes de la DPASS, la DERES, la coordinatrice de la veille éducative de la ville de Païta et l’USEP – ont été chaleureusement salués par Marie-Jo Barbier, élue provinciale et présidente de la commission de l’enseignement, qui a rappelé l’engagement actif de la province Sud : « Je peux vous assurer que la collectivité est pleinement mobilisée pour lutter contre les dangers des écrans, et ce dès le plus jeune âge. Avec le renforcement de la prévention à l’exposition des enfants aux écrans, notre souhait est de réglementer l’usage des téléphones en primaire et au collège. Dans certains établissements scolaires, 80 % des enfants viennent à l’école avec des téléphones. Nous travaillons sur une réglementation stricte des téléphones en primaire pour agir concrètement et protéger nos enfants ». Les parents ont ensuite pu découvrir les productions de leurs enfants en circulant dans les classes. Un temps fort qui a permis de sensibiliser les familles, de partager des solutions et de renforcer la dynamique collective au service du bienêtre de nos enfants. Usage à limiter. Ces dernières années, les études se multiplient et les constats sont inquiétants. Selon l’OMS, les enfants de moins de deux ans ne devraient jamais être exposés aux écrans, et au-delà de cet âge, l’usage doit rester très limité. Or, la réalité est tout autre : en France, les 3-6 ans passeraient déjà près de 2 heures par jour devant un écran, selon Santé publique France. Les chercheurs alertent sur des effets mesurables sur le développement du cerveau : troubles du sommeil, retard du langage, baisse de l’attention et de la mémoire, sans compter la dépendance comportementale qui s’installe très tôt. Une sur-stimulation qui, paradoxalement, engendre souvent l’ennui et la frustration quand l’enfant n’a plus d’écran sous la main. Mesures radicales. Face à cette dérive, plusieurs pays ont déjà pris les devants. En Corée du Sud, l’État finance des «camps détox» pour adolescents accros aux jeux vidéo. En Finlande ou au Danemark, les écoles privilégient le retour à la motricité, à l’apprentissage sensoriel et aux jeux collectifs, considérés comme essentiels au développement de la pensée. Partout, on expérimente, on teste, on régule. « La Nouvelle-Calédonie, avec des initiatives comme celle de l’école Heinrich Ohlen, s’inscrit dans ce mouvement mondial de vigilance et d’éducation, insiste Marie-Jo Barbier. En Australie aussi, la question des écrans est devenue un véritable sujet de société. Le gouvernement fédéral a récemment révisé ses recommandations : pas d’écran du tout avant deux ans, moins d’une heure par jour entre deux et cinq ans, et un usage “encadré et réfléchi” au-delà ». Dans certaines écoles, notamment dans l’État de Victoria, les téléphones portables sont désormais totalement interdits dans l’enceinte scolaire, du primaire jusqu’au lycée. L’objectif affiché est clair : restaurer la concentration, la socialisation et la qualité des apprentissages. Les Australiens ont également développé des programmes communautaires innovants. Des campagnes comme Digital Detox Week encouragent les familles à relever le défi du «week-end sans écran», tandis que des associations locales, comme eSafety Commissioner, proposent des ateliers gratuits sur la cyberdépendance et la sécurité en ligne. Ces initiatives s’appuient sur une pédagogie positive : apprendre à mieux utiliser les écrans plutôt que les diaboliser, redonner du pouvoir de décision aux parents et aux enfants, et replacer la technologie à sa juste place. Accompagner. Car interdire ne suffit pas : il faut accompagner. « L’une des clés réside dans la formation des parents, souvent démunis face à cette révolution numérique qui a bousculé tous les repères éducatifs. Apprendre à instaurer des moments sans écrans, à proposer des activités alternatives, à fixer un cadre clair et cohérent entre l’école et la maison : c’est tout l’enjeu des démarches de prévention et nous nous y inscrivons », conclut l’élue provinciale. La province Sud l’a bien compris et poursuit ses efforts pour sensibiliser, outiller et soutenir les familles, convaincues que la bataille contre l’addiction numérique se joue d’abord dans le dialogue et la cohérence éducative. ÉCRANS ET JEUNESSE, le difficile équilibre

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